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1 mai 2012 2 01 /05 /mai /2012 08:31

1984--Buraglio-Ste-Victoire.JPGMaintenant, dans la culture contemporaine, l’Esprit Saint est à l’œuvre.
« L’heure vient - et c'est maintenant - où les véritables adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité, car tels sont les adorateurs que cherche le Père. Dieu est esprit, et ceux qui adorent, c'est en esprit et en vérité qu'ils doivent adorer » dit Jésus à la Samaritaine. Et le Bienheureux Jean-Paul II l’écrivait aux artistes : « L'Esprit est le mystérieux artiste de l'univers…/…toute inspiration authentique renferme en elle-même quelque frémissement de ce «souffle» dont l'Esprit créateur remplissait dès les origines l'œuvre de la création. » Fin de citation. Mais pourquoi nous est-il si difficile de discerner l’Esprit saint à l’œuvre dans la création contemporaine ?
Evidemment, Dieu se laisse plus facilement identifier dans son Eglise qui est templede l’Esprit. De nombreux repères en marquent l’identité. Le temple est visible : symboles, chants, rites et images et parfois slogans permettent de le distinguer clairement. Mais Dieu l’Esprit Saint ne s’y laisse pas enfermer. Aucun temple, ni aucune définition n’emprisonne Dieu qui est esprit. Dans l’histoire du salut, le Saint Esprit se manifeste sous des figures qui toujours échappent : le feu, l’étreindre c’est l’éteindre ; l’eau vive et vivifiante ; le vent qui souffle où il veut ; et même un animal : la colombe si farouche ! Autant de figures évanescentes, toujours insaisissables… à moins de vouloir mettre la colombe en cage.
Eh bien, c’est ce souffle de l’Esprit créateur que nous cherchons dans l’art. Non parce que l’art le détiendrait –on ne peut faire de l’Esprit un détenu - mais parce que l’art nous offre la possibilité d’en éprouver de subtils frémissements. A l’insu. A notre insu et à l’insu des artistes, même de ceux qui l’invoquent. On aimerait savoir ! Retrouver de rassurants repères, des signes distinctifs : figures identifiables, références explicites, Mais le savoir encombre si souvent la grâce.
Il nous est difficile de discerner l’Esprit saint à l’œuvre dans la culture contemporaine parce qu’il requiert à la fois un effort de vérité et l’engagement croyant de notre propre subjectivité sensible. Comme un artiste chacun de nous doit travailler « sans filet ». Chacun est appelé à vivre cette expérience émouvante pour la pensée : éprouver les frémissements du souffle créateur au cœur de l’expérience esthétique, toujours à libérer des critères, des balises et des repères officiels… « Dieu est esprit, et ceux qui adorent, c'est en esprit et en vérité qu'ils doivent adorer. »

* Pierre Buraglio, La sainte Victoire, d'après Matisse. 

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9 avril 2012 1 09 /04 /avril /2012 17:18

05bis-Resurrection.JPGBeauté des Rameaux ou beauté pascale ? nous demandions-nous la semaine dernière. La foule des Rameaux acclamait un roi en éventuel vainqueur politique. Un héros. Déçue, la même foule a réclamé Barabbas et hurlé à Ponce Pilate « Crucifie-le ! Crucifie-le ! ». La beauté immédiate et séduisante que diffusent l’éclat de la jeunesse et du pouvoir dans le rayonnement chaleureux de décors somptueux et de paysages pittoresques se retire devant la beauté d’un visage buriné par les combats de la vie et la beauté silencieuse de non-lieux abandonnés. C’est la pierre rejetée des bâtisseurs qui est devenue la pierre d’angle. » chante le Psaume. Le transfiguré- le plus beau des enfants des hommes - n’avait plus visage humain sous les coups de ses bourreaux ni sur la Croix. Il endossait la laideur brutale du péché, de la souffrance et du Mal. C’est défigurée par la souffrance que la figure par excellence nous entraîne vers la beauté pascale.

La Parole de Dieu nous invite à chercher la beauté du Ressuscité non plus dans les splendeurs du Temple ou de la ville sainte mais dans la Galilée des nations. Ailleurs ! Une beauté inattendue qui dérange, bouscule, provoque. Et je cite le Saint Père : « Si nous acceptons que la beauté nous touche intimement et nous blesse, …alors nous redécouvrons la joie de percevoir le sens profond de notre existence ». C’est ce que redisait Benoit XVI aux artistes : La beauté du ressuscité est une beauté qui blesse. Elle manifeste Logos incarné   au cœur-même des laideurs et de l’effroi. L’art authentique accompagne notre quête de cette beauté pascale et oriente nos regards au-delà des séductions immédiates du marketing et des colifichets du bon-goût obligé. C’est ainsi que la culture contemporaine vient solliciter notre foi et .. la cultiver.    Dans la joie de Pâques, belle semaine !
*** Image : 1993, Résurrection, Sylvie Gaudin (église Saint Gervais, Paris). 

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2 avril 2012 1 02 /04 /avril /2012 08:39

Titus-Carmel-1986--Grande-Boreale-n-2--h.t--245x320.jpgEt si on parlait de beauté ? Mais, beauté des Rameaux ou beauté pascale ?

Notre désir de beauté confusément vécu comme une quête de Dieu nous fait chercher tant dans la nature que dans l’art, la délicatesse, l’harmonie et la douceur que nous prêtons à la beauté. Comme une évidence.

En même temps nul ne peut ignorer que la beauté dans nos magazines comme sur les moteurs de recherche désigne ces cosmétiques qu’on appelle « produits de beauté ». Pour s’en défendre on parlera du Beau, au masculin… Le beau, comme un concept dont les philosophes s’emparent inlassablement. Mais qu’en dit la Bible ?

De la Genèse à l’Apocalypse la Bible ne distingue pas entre le beau et le bien. Dès la création Dieu vit que la lumière était belle ; et lorsqu’il appela le continent «terre» et la masse des eaux «mers», Dieu vit que cela était beau. C’est ainsi que traduit la Septante. Nos bibles traduisent plus volontiers « Dieu vit que cela était bon ».

Pour parler de la beauté l’hébreux emploie plusieurs mots connotés d’éclat et de splendeur ; l’un d’eux est plus particulièrement réservé à la beauté des visages et des corps : de Saraï, de David, d’Absalom… Dans le Nouveau Testament Jésus parle d’un bel arbre, d’un beau fruit, du beau grain qu’on peut effectivement traduire par bon arbre, bon fruit et bon grain. Mais lorsqu’il s’agit des belles œuvres, du bel ouvrage des disciples, la traduction moralisante en « bonnes œuvres » fausse le sens. D’autant plus que les évangiles distinguent bien les œuvres bonnes par ailleurs : « aimez vos ennemis et faites du bien » exhorte Jésus. Et nous sommes « créés dans le Christ Jésus en vue des œuvres bonnes que Dieu a préparées. »  écrit saint Paul aux Ephésiens.

Ainsi, toute la beauté n’est pas engloutie par le bon et le bien. Jésus reconnaît une « belle œuvre » dans le parfum répandu sur lui ; quasiment une œuvre d’art, dispendieuse et ouverte à l’interprétation. Une interprétation que Jésus donne lui-même, en relation avec sa mort et sa sépulture. Eh oui, la beauté d’une œuvre authentique pour un chrétien ne fera jamais l’économie de la mort. La beauté radieuse et immédiate des Rameaux printaniers ne prend sens que de la Passion du Christ. La beauté séduisante des Rameaux ne trouve son accomplissement que par la Croix dans la seule beauté digne de ce nom, celle de la Résurrection. Belle semaine sainte !

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20 février 2012 1 20 /02 /février /2012 10:53

Qui n’a jamais disposé un bouquet de fleurs dans un vase ? Je sais il y en a qui défont le papier et fiche le bouquet dans le premier vase venu. Même ceux-là ne pourront s’empêcher de les soulever un peu pour permettre aux fleurs de se desserrer et au bouquet de s’épanouir.  Et qui sait peut-être même qu’ils prendront un pas de recul pour voir « ce que ça donne ».

06-hortensias-de-porcelaine.JPGEh bien ce pas de recul, physique ou mental, est un acte d’artiste. Voir ce qu’on vient de faire et porter dessus l’estimation d’un regard, c’est une expérience esthétique. Elémentaire, certes, mais primordiale. Une seconde, rien qu’une seconde de recul sur un acte pour en évaluer la forme, l’aspect, l’apparence peut faire entrer dans la voie de la beauté.. A nous de cultiver cette action-réaction entre le geste artistique et le recul esthétique, entre l’acte de création-composition et sa perception-réception. Dans la Genèse, Dieu lui-même agit par sa parole dans un premier récit - il va modeler la glaise dans le second – puis il regarde, il a ce recul pour voir ce que ça donne. « Et Dieu vit que cela était bon. » Devant toute œuvre, de notre composition, signée d’un artiste ou devant celle de Dieu prenons le temps de « voir ce que ça donne ».

« Ce que ça donne » : cette petite locution dit un élément fondamental de l’expérience des artistes et que nous - les observateurs de leurs œuvres - nous partageons avec eux. Notre regard comme le leur peut « voir ce que ça donne ». Parce que ça donne. Les choses, les personnes, les paysages donnent à qui les accueille. Une œuvre d’art agit, elle donne et même elle n’est faite que pour donner. Elle donne des sensations et des émotions qui donnent à penser. Oui, les œuvres d’art agissent, elles donnent d’émouvoir la pensée. Et si ce sont d’authentiques œuvres d’art, vraiment créatrices, elles vibrent encore du souffle qui les a vus naître.

Alors cette semaine, en plus d’aller voir une expo, un film ou une pièce de théâtre  je vous invite à créer et composer, à donner forme à une intuition et à « regarder ce que ça donne ».

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6 février 2012 1 06 /02 /février /2012 10:09

Seminaristes-parisiens-devant-Or--verre--lin-de-Marc-Coutu.JPG

Avec un petit groupe nous regardons une œuvre de Marc Couturier dans les collections permanentes du Centre Pompidou. Depuis cinq minutes, en silence. Face à face, presque un affrontement. D’un côté, une pièce de tissu sur deux cloches de verre reposant sur une sorte de tablette située à la hauteur moyenne des yeux ; de l’autre, un groupe de jeunes gens de moins de trente ans en formation à la faculté Notre-Dame du Diocèse de Paris. Très scrupuleusement ils observent la règle d’observer, tous les sens à l’affut, quelque chose que pour la plupart d’entre eux ils n’auraient pas considéré comme une œuvre d’art.
La qualité de leur description attentive va permettre une élaboration de sens. Leurs remarques ? « Il n’y a pas de couleurs, tout est blanc et ombre sauf des reflets pastels dans le verre ; l’or, ses reflets et ses éclats révèlent la dignité des deux autres matériaux ; le linge en équilibre, délicatement posé sur les deux cloches ; l’ensemble parait suspendu, comme en lévitation ; les jeux de lumière, les ombres et les éclats font partie de l’œuvre : c’est même l’ombre portée qui nous informe sur la forme de la tablette ; et cette tablette qui passe quasiment inaperçue est le seul élément travaillé, jusqu’à la dorure à la feuille. » Effectivement, cette lame au bord très affiné a été obtenue par un long et patient ponçage. Comme le corps de de la croix et de la gloire du chœur de Notre-Dame, et comme la lame insérée dans l’autel de Saint-Denis du Saint Sacrement, deux œuvres commandées à Marc Couturier par l’Eglise Catholique à Paris.
Ce sont les séminaristes de Paris qui ont organisé très librement une session sur le thème « QUEL ART POUR LA NOUVELLE ÉVANGELISATION ? » Tout un programme que ce titre ! L’art y parait d’emblée instrumentalisé en outil de communication d’un message. Juste ce que l’art doit toujours éviter de devenir, un instrument de propagande au service d’une doctrine, même excellente. Il y perdrait son âme.
Le titre de l’œuvre sur le cartel tout proche, « Lin, verre, or », focalise l’attention sur des matériaux. L’artiste préfère les énumérer dans l’ordre ascendant « or, verre, lin » ce qui laisse entendre vers l’un à comprendre peut-être « vers l’unité ». Peu à peu nous comprenons ensemble qu’il ne s’agit pas de comprendre mais d’accueillir l’aura d’une présence et les sensations inhabituelles qu’elle suscite. L’observation de cet énigmatique dispositif nous entraine à accueillir quotidiennement la grâce d’une incertitude dans nos velléités conquérantes. La gratuité de l’art suspend un instant les raisonnements et les convictions. Puissions-nous laisser l’art ouvrir ainsi en nous des voies nouvelles de contemplation. Il devient peu à peu un auxiliaire gracieux sur le chemin du Mystère qui est lui-même Chemin, Vérité et Vie.

« Or, verre, lin » de Marc Couturier à découvrir dans les collections permanentes du Centre Pompidou ainsi que « La Croix et la gloire » qui domine la Pietà de Coustou au point culminant du Chœur de Notre-Dame de Paris. 

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10 janvier 2012 2 10 /01 /janvier /2012 09:55

Je vous raconte : il y a quelques semaines, c’était l’an dernier bien-sûr, j’ai voulu voir un film qui venait de sortir quinze jours plus tôt. Un film de Bouli Lanners, le réalisateur belge d’Eldorado. Surprise : en regardant mon programme préféré je découvre que son film, « Les géants », ne se joue plus que dans une seule salle et seulement à quelques horaires précis.images--1-.jpg

C’est ainsi qu’encore une fois je me retrouve à L’Entrepôt dans le 14ème arrondissement. Et j’ai vu mon film, très bien, dans d’excellentes conditions : une petite salle rutilante avec des sièges confortables. Certes l’Entrepôt ce n’est pas qu’un cinéma, c’est aussi une salle de concerts, des salles de conférences, un bar et un restaurant ainsi qu’une galerie d’objets décoratifs et d’artisanat. Mais rien que pour le cinéma, ça vaut le déplacement. Imaginez un peu : On peut y organiser sa propre séance en choisissant son film dans un catalogue bien rempli de grands classiques et de films indépendants épatants.

Ah  Les Cinémas d'Art et d'Essai ! Heureusement qu’ils existent pour exposer des films comme des œuvres d’art. Des films dont la qualité n’est pas mesurée au box office. Les Cinémas d'Art et d'Essai  constituent un réseau de salles indépendantes au service du pluralisme et d’un cinéma libre qui relève de toutes les créations, en toute liberté. Ils entretiennent un rapport privilégié avec les auteurs, pour leur permettre l’accès à un public plus large.

Les cinémas d’art et d’essai contribuent à la diffusion des films du répertoire ; en salles. Ce sont souvent des lieux vivants, de proximité, qui favorisent l’échange, la réflexion, bref ce sont d’authentiques lieux de culture.

Donoma-affiche.jpgEn France on peut recenser environ mille cinémas d’art et d’essai, avec plus de deux milles salles, réparties sur l’ensemble du territoire français et dans toutes les zones géographiques : pas seulement au centre des grandes villes. A Paris on en compte encore vingt-six, même si beaucoup ont disparu, laminés par les multiplexes. Ils ont jalonné ma vie étudiante, comme les écrins de rencontres parfois bouleversantes. Vous connaissez le Studio Galande ? J’y ai vu deux fois de suite La Salamandre d’Alain Tanner ; le Studio des Ursulines, l’un des plus vieux cinémas de Paris ? l’Action Christine où j’ai découvert Mankiewicz ? Et les Trois Luxembourg, le Lucernaire, La Pagode où j’ai vu le Moïse et Aaron d’Arnold Schönberg filmé par Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, Les Sept Parnassiens, le Denfert, et enfin l'Entrepôt 7 Rue Francis de Pressensé dans le 14ème. Autant de coups de foudre ou de coups de semonce inoubliables, bref toute cette histoire d’amour que d’aucuns entretiennent avec le 7ème art.

Et vous avez essayé "Le Havre" d'Aki Kaurismaki ou le film-guérilla de Djinn Carrénard : "Donoma" ? Bonne semaine !

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27 novembre 2011 7 27 /11 /novembre /2011 18:00

Une diapositive projetée au-dessus d’une porte. Elle représente « Le pilier de l’Alpha et de l’Oméga » photographié par Julien Lousteau. Ce pilier d’une église troglodytique d’Ethiopie - contre lequel Jésus se serait appuyé- en aurait reçu, gravé, tout le passé et tout l’avenir du monde. Mais quiconque regarderait ces inscriptions les verrait s’effacer à jamais. On l’a donc entièrement couvert d’une étoffe.

Lousteau-Julien--2009--Pilier-de-l-Alpha-et-de-l-Omega--di.JPGNe cherchez pas à voir cette photographie paradoxale du tissu qui cache le pilier : elle était au Plateau, Fonds Régional d’Art Contemporain d’Ile de France, dans une expo intitulée « Nul si découvert » et terminée depuis le 7 août. Terminée, cette exposition signée Guillaume Desanges, continue dans ma mémoire. Aujourd’hui, je refuse de vous parler d’actualité. Chaque semaine il y aurait de quoi s’extasier sur un chef d’œuvre !? Allons !!

La culture contemporaine c’est souvent cette mainmise de la productivité et de la quantité qui ont vite fait de vous métamorphoser une œuvre d’art en objet de consommation. Quand l’art s’agenouille devant l’idole que deviennent les Marchés - avec une majuscule s’il vous plaît - un regard chrétien offre la liberté critique. Quand la culture veut imposer le déferlement des nouveautés dans l’avalanche des news, la foi en Jésus-Christ discerne la paix de ce qui demeure contemporain ; maintenant. Cette semaine, ne m’en veuillez pas je préfère ralentir le flux tendu des nouveautés pour savourer l’art ; indépendamment de la pression médiatique. Pour goûter cet art vraiment contemporain qui résiste à l’actualité.Fellini-Roma.JPG

Ainsi, je retrouve en mémoire cette exposition intelligente d’œuvres qui manifestaient l’invisible. Même son titre, « Nul si découvert », se révèle avec le temps riche d’une ambigüité insoupçonnée : « découvert » signifie aussi tout neuf ; « émergent » comme dit le jargon mondain. Nul, serait aussi ce qui n’a pas déjà duré au-delà d’une trop récente découverte. De fait, j’y retrouvais des œuvres d’artistes déjà appréciés et les figures tutélaires de Man Ray, Marcel Duchamp et Federico Fellini avec cette séquence emblématique de « Fellini Roma » où le percement du métro fait disparaître irrémédiablement des fresques antiques.

Pour un chrétien, Dieu révélé en Jésus-Christ, demeure un Dieu qui se cache, vous comprenez. Le Mystère de notre foi, personne ne l’explique mais l’art, lui, nous y implique en suscitant une pensée sensible. Forcément théologienne.

 
* Lousteau Julien, 2009, Pilier de l'Alpha et de l'Oméga, diapositive
** Fellini Roma, la destruction des fresques.

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4 septembre 2011 7 04 /09 /septembre /2011 19:01

Alors, vous êtes allés voir « l’invention de l’œuvre » au Musée Rodin ?

On y approche plusieurs aspects du travail de l’artiste. Mais une œuvre d’art n’est pas forcément un produit manufacturé. Et toute œuvre d’art authentique prend vie et sens au travers d’autres interactions.

L’œuvre elle-même agit sur ceux qui la perçoivent et l’interprètent, imprégnés de leur contexte culturel, économique, politique, social, artistique… Parce qu’avant de vouloir dire quoi que ce soit, une œuvre d’art agit. Quand un plasticien au travail recule de deux pas, c’est pour voir « c’que ça donne ». Il creuse, taille ou assemble, il polit, déforme, compose …puis recule pour sentir « c’que ça donne », ce que son travail donne et donnera à ses destinataires.

Ces reculs de l’artiste le mettent en position de spectateur. Il cumule en permanence expérience artistique - il fait - et expérience esthétique - il perçoit. Le matériau et l’espace ont ré-agi à son geste et informé sa pensée. D’emblée l’œuvre agit. In fine, une œuvre séduit ou indiffère, elle peut étonner, rayonner, interpeller, émouvoir, intimer, provoquer… le public que nous sommes.

Un public qui agit, lui aussi. Aucune réception n’est totalement neutre, et c’est tout un art que de percevoir l’art. Et de le percevoir avec foi. Se rendre disponible, observer attentivement, se laisser intriguer, reconnaître ses émotions, éveiller des souvenirs, réfléchir, imaginer, associer… C’est un savoir faire qui s’apprend.

M’alors, qui fait l’art ? Des marchands et des fabricants font des ‘’objets d’art’’ pour spéculer, décorer ou manifester leur « distinction ». L’art authentique ne se fabrique pas ; comme la beauté, il se reçoit au cœur d’un travail patient, parfois douloureux : un enfantement. Fruit de la terre et du travail des hommes, l’œuvre d’art s’est ouverte à la grâce pour devenir nourriture spirituelle et sensible. Ensemble - les artistes, nous et les œuvres - recevons l’art. Comme le rayonnement d’une création : sa grâce particulière.

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8 juillet 2011 5 08 /07 /juillet /2011 06:38

Pour cette dernière chronique avant la pause estivale, puisque j’en vois encore qui fuient l’art contemporain, je voudrais vous parler de deux petits livres très riches. Ce n’est pas pour se mettre au goût du jour, non, mais croyez-moi l’art contemporain, c’est « un vis à vis essentiel pour la foi ». Et si vous ne me croyez pas, croyez Jérôme Alexandre qui vient de publier : « L’art contemporain, un vis à vis essentiel pour la foi. »

Qu’est-ce que ça veut dire « contemporain » ? Je cite : « Être contemporain est, avant tout, une affaire de courage : parce que cela signifie être capable non seulement de fixer le regard sur l'obscurité de l'époque, mais aussi de percevoir dans cette obscurité une lumière », la lumière qui vient perpétuellement à nous. Je poursuis : ainsi le contemporain « est dans le temps chronologique quelque chose qui le travaille de l'intérieur et le transforme. ». Ces propos sont tirés de « Qu’est-ce que le contemporain ? » du philosophe italien Giorgio Agamben.

Ainsi, vous le sentez, la contemporanéité par excellence c’est le temps messianique, le temps du Christ qui ouvre à sa dimension prophétique tout moment ancré dans une histoire. Jésus achève sa première prédication à la synagogue en disant : «Aujourd'hui ce passage de l'Écriture s'accomplit à vos oreilles.» De même il dit à la Samaritaine « l'heure vient - et c'est maintenant - où les véritables adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité. ». Ce maintenant, cet aujourd’hui sont éternels. Copie de P1030675

Allez voir comment des lits de camps sous des parasols écrus bordés de guirlandes d’ampoules anémiées font grincer « l’Hymne à la joie » très contemporain de Claude Lévêque. C’est à la galerie des galeries Lafayettes jusqu’au 20 août. Emportez dans vos valises ces deux petits livres : « L’art contemporain, un vis à vis essentiel pour la foi », un cahier du collège des Bernardins signé Jérôme Alexandre ; et « Qu’est-ce que le contemporain ? » de Giorgio Agamben, aux éditions Rivages, quarante pages, 5 euros.

Très bon été à tous !

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18 juin 2011 6 18 /06 /juin /2011 09:26

L’art émeut la pensée. Je veux dire que le temps consacré à une œuvre d’art donne à nos pensées la couleur des émotions. Depuis des siècles en Europe, penser, c’est raisonner. Avec une raison qui arraisonne la folle du logis, la troublante imagination qui gène la raison claire et distincte : elle seule accède à la vérité dégagée de toute affectivité trop sentimentale. Une vérité désaffectée. Eh bien, à mi-chemin (Petit 1) de l’excès sentimental et (petit 2) de l’excès intellectuel, l’expérience des œuvres d’art nous offre (petit 3) la grâce d’une initiation mystique.

(Petit 1) : Face à une œuvre d’art, (imaginez le dernier tableau qui vous a touché) il est vrai que certains se laissent submerger par leurs émotions : déception ou admiration, empathie ou ennui ; du coup ils les projettent sur l’œuvre au point de la recouvrir d’une épaisse couche de subjectivité. Alors de belles envolées lyriques permettront d’admirer l’orateur au détriment de l’œuvre.1966--Joseph-Kosuth--Subject-and-object--10x318.JPG

Joseph Kosuth, Subject and object, 1966

(Petit 2) : Face à une œuvre d’art d’autres analysent scrupuleusement à l’aide de grilles de lecture que des théories projettent sur l’œuvre pour la comprendre. Tel ou tel discours abscons bien que solidement charpenté philosophiquement laissera pantois et convaincra chacun de son incapacité intellectuelle devant l’art passé au crible de la rationalité conquérante.

Face à une œuvre d’art, ou plus exactement « avec elle » un chrétien cherche l’équilibre entre ces deux excès. Pourquoi ? Mais pour retrouver la saveur à l’origine de la sapience qui est la sagesse d’une vérité incarnée, éprouvante et mystérieuse.

(Petit 3) Si croire fait comprendre et voir, la foi chrétienne a ce privilège d’introduire en art un juste rapport à l’œuvre : une connaissance par l’épreuve : à la fois respect de l’autre dans son objectivité - comme un tombeau vide, trace d’une absence précisément décrite par les évangélistes, en même temps qu’adhésion intime d’un acte de foi - comme la résurrection vivifiante, présence insaisissable, si ce n’est dans l’ultime œuvre du Christ : l’Eucharistie.

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